Montreuil - Makwacha, Makwacha - Montreuil. Va et vient entre les continents pour comprendre la façon dont font sens des fresques sur des murs, pour celles qui les peignent, et pour d'autres spectateurs, parfois radicalement lointains.

Comme repères et entrées dans cette recherche : mondialisation, technologies de l'information et expérience esthétique...




3 juin 2013

J – J+6 :Prendre ses repères - Ou : Lubumbashi et moi…

Avant de partir, j’avais re-discuté avec les deux ou trois personnes s’étant rendues sur place, à la va-vite consulté ou re-consulté quelques sites et guides – il a suffi d’une quinzaine de minutes à l’arrivée pour que les doctes informations soient balayées : place au sensible !

here is the point : en combien de jours une personne trouve- t-elle ses repères ?

Faible relationnel, terrain inconnu, mœurs a priori étrangères…comment fais-tu alors, jeune fille ? Neuf mois que tu cherches à partir, tu y es !  Cris, gestes, chaleur, mouvement… apprend, apprend à interpréter.

Tu marches dans la rue, soleil d’aplomb, le trottoir devient un trou, un amas de cailloux, la femme à quelques mètres de tes pieds te regarde, « des bananes madame », devant elle une corbeille avec un écriteau « 300 », tu fais le calcul, t’apprêtes à répondre, un gamin vient pour cirer tes pompes, ne sait que faire devant tes chaussures de montagne, un homme te demande si tu es belge, tu décides de traverser, les voitures passent, tu emboîtes le pas d’un homme, tu as faim, tu n’as que des dollars (ne jamais les plier, ne jamais les froisser, ne jamais les montrer ) en l’absence de poche, ils sont dans ton sac, tu gênes le passage, beaucoup d’homme te regardent, tu te demandes si ta robe est transparente et si elle est trop courte, tu regardes à la volée les robes des autres femmes, le soleil te fait mal aux yeux, tu sors tes lunettes de soleil, « Laetitia la star », plus fort « Laetitia la star », tu te retournes, souris à l’homme qui astique les jantes de la voiture et t’observe gouailleur, tu sens l’odeur de grillades, ton regard s’arrête sur le fût renversé sur lequel cuisent des paquets verts, le vendeur a vu ton regard, « tu en veux madame », tu ne sais pas si tu peux manger ça…

 « Muzungu, muzungu » appelée de-ci de- là, hommes, femmes et enfants cherchent à vendre, je  cherche à négocier, les hommes cherchent à séduire, je cherche à rencontrer, les contacts donnent d’autres contacts, je cherche également à sortir du réseau…l’impression de marcher en crabe.

J’ai tourné le dos (pour l’instant !) à la Guest House et au dortoir de l’Université pour leur préférer le « Home de la Jeune Fille » de Sœur Marcelline, situé en plein centre ville (un bloc de quatre ou cinq rues) pour m’éviter (entre autres) de prendre le taxi en permanence. Je loge seule, dans une grande bâtisse, située à l’entrée d’une grande parcelle ceinte d’un haut mur garni de barbelés, dont le portail est surveillé par deux gardiens – à l’autre bout de la parcelle habitent sœur Angèle et les filles du pensionnat. Lorsqu’il y a une coupure de courant, cela fait un peu drôle…

6 jours après l’arrivée :

Je suis capable de me faire une idée de la ville (les points cardinaux : la Poste, la cathédrale, Unilu, la Halle de l’étoile, la Gécamine…) et de m’y déplacer en transport collectif (les « cinq cinq » = 5 personnes à 5OO fc congolais, ça fait une voiture à 2500, possible sur des tronçons de routes identifiés – il faut savoir reconnaître le taxi et surtout anticiper son axe – en fait, je suis montée dedans deux fois, une fois par hasard, l’autre fois accompagnée. Et les taxis individuels ou presque – parfois on les partage…). Il n’existe pas de plan de la ville et pour donner une adresse, il faut donner comme la dérivée de la destination finale (rues adjacentes, bâtiment connu, etc.).

J’ai plusieurs numéros de personnes dans ma carte SIM congolaise (quelques expats - répertoire qui facilement pourrait s’étendre - et une dizaine de contacts congolais, rencontrés plus ou moins par hasard).

Mon savoir livresque sur le Katanga, sur ses mouvements de populations etc. correspond désormais à une expérience, à des goûts et des paroles –  la cartographie mentale s’affermit, les pièces du puzzle se rassemblent, il est temps pour moi d’aller voir Makwacha.

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